Bonjour,
Prétendre, comme l'a fait la femme avec qui tu as discuté JMSud, que le fait de ne pas voir des hommes en jupe n'est pas une discrimination mais une simple question d'habitude, révèle une absence d'intérêt et donc une méconnaissance du problème. Les usages vestimentaires semblent être de simples conventions en démocratie, mais cette inertie vestimentaire cache des contraintes sociales (conjugales, familiales, de voisinage, amicales, professionnelles, communautaires, notamment religieuses) extrêmement fortes.
La pensée de cette dame reflète le nihilisme de notre société sur la condition masculine, sujet complètement occulté par la puissance de notre organisation politique, économique et sociale patriarcale, mais également par la vague féministe actuelle qui réduit l'homme à un coupable et non pas à une victime. Le livre de Lucile Peytavin, Le coût de la virilité (édité chez Anne Carrière en 2021), que j'ai déjà évoqué sur ce site, est pourtant éloquent: les hommes sont plus victimes que les femmes des punitions à l'école, d'échec scolaire, d'accidents de la route, d'emprisonnement et de suicides, autant d'indicateurs, de "symptômes" révélateurs d'un malaise masculin, d'une éducation masculine aboutissant à l'impasse, d'un décalage entre les attentes sociales et la capacité d'un simple être humain à les accepter.
Le paroxysme de ce patriarcat inhumain est révélé par la guerre en Ukraine, dans la quelle des jeunes hommes russes sont enrôlés malgré eux avec la mobilisation partielle: des êtres humains sont conduits à la mort parce qu'ils sont nés hommes, comme si leur nature le déterminait, ce qui fait que certains préfèrent le suicide plutôt que de tuer ou de subir une mort dans l'agonie, comme ce rappeur russe qui a publié une vidéo sur le net la semaine passée indiquant son choix. D'ailleurs, le titre du livre de Zveltana Alexsievitch, prix Nobel de littérature 2015, La guerre n'a pas un visage de femme, me heurte en tant qu'homme pour plusieurs raisons: tout d'abord parce qu' un tel postulat fait reposer sur l'homme tout le devoir moral de tuer et d'être tué, ensuite parce que l'homme n'est pas plus prédisposé à générer et à subir de la violence que la femme, enfin parce que les femmes ont su (et à juste titre), ces dernières décennies, rejeter le déterminisme pour conquérir des droits, et ne doivent donc pas en user pour se défaire de devoirs.
La médiatisation en défaveur des hommes est révélée implicitement par le succès du dernier livre d'Annie Ernaux, Le jeune homme, publié en 2022 et qui a contribué à lui accorder le prix Nobel de littérature il y a quelques jours. Ce roman raconte une relation qu'elle a au avec un homme âgé de 30 ans de moins qu'elle, symbole, dans les médias actuels, de la libération de la femme. Imaginez la publication actuelle d'un livre racontant une relation entre un homme et une personne de sexe opposé de 30 ans de moins: l'homme en question serait considéré au moins comme un prédateur.